La lumière naturelle est un élément fondamental de la conception architecturale centrée sur l’humain, au même titre que l’intégrité structurelle et le choix des matériaux. Cependant, l’éclairage naturel à l’intérieur du bâtiment n’est pas aussi bien compris qu’il devrait l’être, surtout si l’on considère que l’homme moderne passe plus de 90 % de sa vie à l’intérieur1. Nous avons discuté avec Lisa Heschong, experte en éclairage naturel et auteur de Visual Delight in Architecture, de l’importance d’un bon éclairage naturel en architecture, de son aspect et de la manière de le réaliser. Lisez la suite de la conversation, y compris sept règles à respecter pour une utilisation optimale de la lumière naturelle en architecture.
La Verrerie Walker – Commençons par parler de la lumière du jour et de vue vers l’extérieur. Nous bénéficions des deux. Nous avons besoin des deux. Quelle est la contribution de chacune d’elles pour le bien-être de l’être humain?
Lisa Heschong – J’ai passé les 25 premières années de ma carrière à me concentrer sur la lumière du jour comme source d’éclairage dans les bâtiments, en l’examinant strictement du point de vue de performance visuelle à l’aide de critères développés par l’Illuminating Engineering Society. J’étudiais les besoins de la lumière électrique ou du jour, qui devaient être des sources équivalentes, et comment répondre à ces besoins visuels aussi efficacement que possible. Il y a 20 ans, j’ai commencé à réaliser que l’impact de la vue n’était pas considéré dans l’équation de l’expérience humaine d’un espace. Depuis, ma réflexion sur la vue n’a pas cessé d’évoluer.
1. Utiliser plusieurs sources de lumière naturelle
LH – Il est certain que la lumière du jour est une source d’éclairage très importante. Je suis une grande partisane de l’utilisation des puits de lumière, qui amènent la lumière du jour au centre de l’espace. Je recommande également de concevoir les bâtiments de manière que tous les vitrages contribuent à un éclairage équilibré. Cela implique d’avoir de la lumière du jour provenant de plus d’une direction. L’éclairage naturel multidirectionnel réduit les ombres, le contraste, l’éblouissement et permet à l’ensemble de l’espace d’être éclairé de manière plus homogène. Vous pouvez utiliser des fenêtres ayant plus d’une orientation dans une pièce, des fenêtres panoramiques sur plus d’un mur dans une pièce, et un puits de lumière, ensemble ils apportent plus de luminosité dans un espace. Ce sont toutes des techniques qu’un architecte doit connaître et comprendre.
3 variations de l’éclairage multidirectionnel
Fenêtre + lucarne; fenêtres à partir de 2 directions; fenêtre haute avec du dépoli en haut
2. Une pièce avec vue : l’importance des fenêtres
LH – Les gens ont tendance à considérer la vue de la fenêtre comme allant de soi, à moins bien sûr qu’ils ne soient des agents immobiliers et qu’ils connaissent la valeur énorme qu’une bonne vue peut apporter à un bâtiment. Nous n’avons pas été formés pour réfléchir ou discuter des mérites d’avoir la possibilité en tout temps de regarder à l’extérieur.
Cependant, mes recherches m’ont permis de constater que les fenêtres sont la principale source de stimulus circadien à l’intérieur du bâtiment. C’est parce qu’elles sont à la fois plus lumineuses et plus intéressantes que le reste d’un intérieur éclairé par la lumière du jour, et les gens les regardent plus souvent. Par conséquent, la capacité de regarder à l’extérieur est une composante essentielle du bien-être que procure la lumière du jour.
The Garden Room du National Aviary
Architecte : Perfido Weiskopf Wagstaff + Goettel
Verre : 6 mm Acuity™ motif sur mesure en surface 1 et 6 mm Acuity™ Solarban® 72 en surface 3
3. Réduire le contraste et l’éblouissement
WG – Qu’en est-il de la gestion de la lumière du jour? Et comment les architectes peuvent-ils utiliser des matériaux tel que le verre dépoli à l’acide pour améliorer l’éclairage naturel ?
LH – Utilisé correctement, le verre diffusant peut fournir un éclairage très uniforme. Je recommande toujours le verre diffusant pour les puits de lumière. Pour cette application, le verre peut rendre une lumière très forte et la diffuser de manière uniforme, large et douce dans l’espace. Un puits de lumière empêche la lumière directe de créer de fortes concentrations qui peuvent créer un éblouissement avec réflexions ou un inconfort thermique si elle est dirigée directement sur la tête d’une personne.
Lorsque vous utilisez du verre diffusant, il est important de se rappeler qu’il peut devenir très lumineux en cas de lumière directe. Ce type de verre prend essentiellement le faisceau de lumière du soleil et l’étale, de sorte que la lumière naturelle remplit toute la pièce. Cela rend également toute la surface de la fenêtre plus lumineuse, et peut créer des silhouettes dans certaines circonstances. Ainsi, l’utilisation de verre diffusant nécessite une attention particulière à qui le regardera et s’il sera en pleine exposition du soleil.
L’utilisation de verre dépoli à l’acide
L’utilisation de verre dépoli à l’acide est l’un des moyens les plus efficaces pour diffuser la lumière du soleil et optimiser la lumière naturelle dans un espace. Les architectes peuvent obtenir une grande variété de conditions d’éclairage en choisissant simplement la bonne combinaison de substrat, de fini dépoli à l’acide et d’emplacement du verre.
Pour en savoir plus sur l’éclairage naturel avec le verre dépoli à l’acide, consultez notre article intitulé, Comment le verre dépoli à l’acide peut illuminer votre journée.
Vous pouvez également explorer notre sélection de verre dépoli à l’acide.
The REACH du Kennedy Center
Architecte : Steven Holl Architects
Rampe de verre : 10 mm verre Starphire Ultra-Clear® dépoli à l’acide Velour 2 faces
WG – L’éblouissement est un problème sérieux. Pourquoi cela nous dérange-t-il autant ?
LH – L’éblouissement est douloureux. Cela vous empêche de voir ce que vous voulez regarder. L’éblouissement c’est comme le bruit. Et le bruit vous empêche de bien entendre ce que vous voulez. De la même manière, l’éblouissement nous empêche de regarder confortablement ce que nous désirons voir.
Cela dit, les jeunes ont des yeux qui s’adaptent très rapidement. L’être humain dispose d’un vaste champ de vision, et quand on est jeune, on le considère comme acquis. Même si quelque chose est éblouissant, vos yeux récupèrent très rapidement. Cependant, plus vous vieillissez, plus vos yeux mettent du temps à récupérer. Pour une personne âgée, l’éblouissement peut rester handicapant pendant plusieurs minutes. De même, pour les personnes âgées conduisant la nuit, le contraste entre les phares et l’obscurité est incommodant.
Il est important de noter que ce n’est pas la luminosité qui fatigue nos yeux, en soi. C’est le contraste. Par exemple, lorsque ma mère a atteint ses 90 ans, elle a gardé tous les rideaux de la maison fermés. Cependant, elle aimait sortir au balcon et s’asseoir en plein jour pour regarder le jardin. C’est parce que le jardin bénéficiait d’un éclairage uniforme, même s’il était probablement mille fois plus lumineux que dans la maison. Elle évitait les contrastes excessifs.
4. La règle des 90-10 pour la lumière du soleil pour les espaces intérieurs
WG – A quoi ressemble un bon éclairage naturel, selon vous ?
LH – Dans une pièce bien éclairée par la lumière du jour, tous les humains et les plantes ont l’air bien, tandis que les couleurs sont claires et vives. Il est facile de tout voir. C’est comme être à l’ombre d’un grand arbre en été, ou marcher dehors par un jour légèrement couvert. Il y a beaucoup de lumière naturelle diffusée, mais il y a toujours suffisamment de rayons de soleil pour donner de l’éclat et des reflets.
Notez la distinction entre la lumière du jour diffusée et la lumière directe du soleil. La lumière du jour diffusée crée des ombres douces, tandis que les rayons du soleil créent des ombres nettes. La lumière directe du soleil peut être dix à cent fois plus brillante que la lumière diffuse du ciel.
L’habitat Wetlands du National Aviary
Architecte : Montgomery Smith
Verre : 3mm & 5mm Starphire Ultra-Clear®, AviProtek® motif 214 en position 1
Verre pleine surface : 3mm Starphire Ultra-Clear®, Velour en position 1
J’ai une règle de base pour les concepteurs : laissez la lumière directe du soleil sur environ 10 % d’un intérieur, jugé par rapport à la surface au sol. Cela permet de créer de l’éclat et de l’intérêt, tout en évitant de submerger les gens avec trop de lumière. Dans le cadre des mesures de l’éclairage naturel que nous avons créées par l’intermédiaire de l’ « Illuminating Engineering Society2 », quelque part entre 2 % et 20 % d’exposition annuelle de la lumière du soleil dans un espace semble être le niveau tolérable. À plus de 2 % de la surface au sol exposée à la lumière du soleil, nous pensons que les gens sont susceptibles de commencer à fermer les rideaux, et à plus de 20 %, ils sont souvent submergés et perdent le contrôle.
5. Donner aux occupants le contrôle de leur éclairage avec la lumière naturelle
WG – Les gens commencent à fermer les rideaux et à assombrir l’espace, non ? À ce stade, ils perdent le bénéfice de la vue vers l’extérieur et de la lumière du jour.
LH – C’est exact, et ce n’est pas grave si c’est temporaire. Il est presque impossible d’anticiper toutes les conditions visuelles dans un espace car la lumière du jour est très dynamique. Par conséquent, vous devez permettre aux occupants de fermer les rideaux. Même si vous pensez savoir exactement où le soleil va se trouver, les surfaces réfléchissantes peuvent apparaître et créer des conditions intolérables lors des journées ensoleillées. Par exemple, il peut y avoir des reflets de la lumière du soleil temporaires, mais intolérables, provenant des flaques d’eau, d’autres fenêtres ou de pare-brises. Presque tous les bâtiments finiront un moment ou l’autre par être rénovés et équipés d’une forme de contrôle de la lumière naturelle opérable, si ce n’est pas le cas dès le départ. Par conséquent, autant y penser dès le départ et faire les choses correctement.
6. Vous ne pouvez pas simuler la lumière naturelle du jour
WG – La lumière du jour change au cours de la journée, et maintenant nous pouvons obtenir un éclairage artificiel programmé pour imiter les cycles de la lumière du jour. Ces types d’éclairage sont-ils équivalents en termes de rythmes circadiens et du bien-être humain ?
LH – Les ingénieurs essaient constamment de trouver la formule parfaite qui leur permettra d’imiter la nature. Lorsqu’ils croient avoir obtenu la bonne combinaison, les biologistes découvrent quelque chose d’autre sur les systèmes naturels qui n’avait pas été pris en compte dans la formule de l’ingénieur. J’ai été témoin de ce processus à maintes reprises lors des dernières décennies. Nous avons tendance à croire que les humains peuvent tout comprendre et trouver la solution parfaite afin de remplacer la nature et pour en fabriquer un produit à vendre. Il y a beaucoup de gens qui travaillent très fort sur ce sujet.
Par exemple, nous avons appris récemment que les effets de la lumière du jour sur la santé ne se limitent pas à son moment et à son intensité, mais aussi aux subtilités de ses longueurs d’onde et de la façon dont elles changent au cours de la journée. Ces changements sont particulièrement visibles à l’aube et au crépuscule, lorsque le contenu spectral de la lumière du jour change le plus rapidement. En outre, il est très difficile de faire correspondre l’intensité de la lumière du jour à celle de l’éclairage électrique, et cela est dispendieux en termes d’énergie.
La lumière du jour donne également aux gens une compréhension visuelle directe de leur environnement, soutenant notre « carte cognitive » interne. La météo, l’heure de la journée et la progression naturelle de la lumière du jour dans le temps nous donnent le sentiment d’orientation temporelle et spatiale. Grâce à la lumière du jour, on se sent ainsi connecté à la vie et au monde réel. Même si nous pouvions simuler parfaitement la lumière du jour, les gens sauraient toujours qu’ils se trouvent dans une simulation. Ce serait comme être dans un film 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, plutôt que dans la vraie vie.
Le Krishna P. Singh centre de nanotechnologie à l’Université de la Pennsylvanie
Architectes : Weiss/Manfredi Architects / R.A Heintges & Associates Building Envelope consultants
Verre : 6mm Starphire Ultra-Clear® avec des motifs Velour sur mesure en surface 1
WG – Ce commentaire tombe à point, compte tenu que ces dernières années, une part de notre quotidien est devenue virtuel. Quels que soient les progrès de la science ou la mesure dans laquelle nous sommes « connectés » par la technologie virtuelle, nous avons toujours besoin d’une connexion avec le monde réel.
LH – Absolument, il n’y a rien de plus réel que la lumière du soleil.
7. Emplacement, emplacement, emplacement
WG – Y a-t-il autre chose d’essentiel que les architectes devraient savoir ?
LH – Eh bien, pour faire un bon travail avec la lumière du jour, un architecte doit vraiment comprendre l’orientation du soleil et le positionnement quotidien et saisonnier par rapport à l’emplacement du bâtiment. C’est aussi fondamental que de comprendre où se trouve la gravité. Vous ne devez pas concevoir un bâtiment sans comprendre le mouvement solaire et le climat local. Par exemple, où, quand et pourquoi l’excès de la lumière du soleil est-il un problème ?
WG – Merci beaucoup pour votre temps et pour avoir partagé votre expertise avec nous.
Comme nous l’avons vu, un bon éclairage naturel est crucial pour le confort humain et le bien-être. La lumière naturelle est plus complexe que beaucoup peuvent le penser. Surtout, lorsque vous combinez différents facteurs tels que la diffusion, l’éblouissement, le moment de la journée et le comportement imprévisible des occupants. Les concepteurs et architectes savent comment exploiter ces éléments pour créer une symphonie de lumière naturelle harmonieuse qui inspire le plaisir plutôt que l’inconfort.
Des règles pour une utilisation optimale de la lumière naturelle en architecture
Voulez-vous concevoir des bâtiments bien éclairés par la lumière du jour ? Voici une liste des sept éléments essentiels à prendre en compte pour un espace bien éclairé :
- 1. Utilisez plusieurs sources de lumière naturelle. Par exemple : concevez des fenêtres combinées à un puits de lumière, ou des fenêtres sur plusieurs côtés pour réduire les contrastes.
- 2. Pour une pièce avec une vue vers l’extérieur: incluez des perspectives sur l’extérieur dans votre stratégie de conception d’éclairage naturel.
- 3. Réduisez le contraste et l’éblouissement. Les matériaux diffusants la lumière naturelle tel que le verre dépoli à l’acide, permettent de répartir uniformément la lumière du jour dans un espace, réduisant ainsi les contrastes brutaux et rendant la lumière plus agréable pour les yeux.
- 4. La règle des 90/10 : visez 90 % de lumière du jour diffusée à l’intérieur d’une pièce, et 10 % de lumière directe du soleil. Ainsi, l’éclairage général restera doux et uniforme, tout en permettant aux éclats et aux reflets d’ajouter un intérêt visuel.
- 5. Donnez le contrôle aux occupants. Prévoyez des rideaux pour permettre aux occupants de gérer la lumière du soleil et du jour dans leurs espaces.
- 6. Vous ne pouvez pas simuler la lumière naturelle du jour. Les rythmes circadiens ne se limitent pas seulement à la synchronisation. De plus, la lumière naturelle du jour est toujours meilleure pour la santé humaine que les simulations artificielles.
- 7. L’emplacement, l’emplacement, l’emplacement : avant tout, vous devez comprendre la dynamique des positions solaires et des conditions d’éclairage du site de construction.
First Commonwealth Federal Credit Union
Architecte : RGW Architecture LLC
Verre : 6mm verre clair dépoli à l’acide Velour en surface 2
À propos de Lisa Heschong
Lisa Heschong a été l’une des directrices fondatrices du Heschong Mahone Group (HMG) et a été une architecte pendant 30 ans. Chez HMG, une société de conseil en science du bâtiment et en efficacité énergétique basée à Sacramento, en Californie, Mme Heschong a dirigé l’équipe de recherche qui a établi une corrélation entre la lumière du jour dans les salles de classe et l’amélioration des performances des élèves, et entre la lumière du jour et les ventes au détail.
Elle est membre de l’«Illuminating Engineering Society » (IES) et nouvellement élue membre du « Daylight Academy ». Elle a présidé le comité des médailles de l’IES et le comité des mesures de la lumière du jour de l’IES, où elle a contribué à l’établissement d’une nouvelle série de mesures de la performance de la lumière du jour basées sur le climat, notamment le sDA et l’ASE.
Son dernier livre, Visual Delight in Architecture: Daylight, Vision and View (Routledge 2021), explore les nouvelles découvertes sur l’importance physiologique, cognitive, sociale et culturelle de la lumière du jour et de la vue dans nos environnements quotidiens.
Pour en savoir plus, consultez le site lheschong.com
References
- Heschong, Lisa. Visual Delight in Architecture: Daylight, Vison and View (New York: Routledge, 2021), 1.
- LM-83-23, Approved Method: Spatial Daylight Autonomy (sDA) and Annual Sunlight Exposure (ASE), Illuminating Engineering Society, www.ies.org